Le mas du Barret

L’Arche d’Alliance, ses chérubins et Saint-Vérand

Par Jacques Roux

Arte programme en ce mois de janvier 2021 un documentaire passionnant et révélateur sur l’Arche d’Alliance et sa supposée « mystérieuse » disparition : « L’Arche d’Alliance, aux origines de la Bible ». A voir et revoir.

L’occasion de nous remémorer un épisode biblique qui relève de la foi tout autant que de la légende. Souvenons-nous qu’Indiana Jones s’y intéressa à ses débuts ! Selon certains des manuscrits qui constituent la Bible, Yahvé aurait confié à Moïse, qui fuyait alors l’Égypte avec son peuple, des « Tables de la Loi » censées fonder une Alliance entre Dieu et le peuple des humains. Dieu aurait même indiqué à Moïse les caractéristiques du futur réceptacle de ces « Lois » gravées dans la pierre. Matériaux : bois d’acacia et or ; forme : une sorte de coffre que traditionnellement on nomme « Arche » ; dimensions (ultra précises !). Une description qui entrait dans les détails : le couvercle d’or (nommé « propitiatoire ») devait être orné de deux Chérubins destinés à protéger, sinon encadrer, la présence divine. Ces deux « Chérubins » dans notre imaginaire sont devenus ce que le mot désigne désormais : des angelots. Ils n’étaient pas cela à l’origine, mais des êtres composites, dont le célèbre Sphinx peut donner une idée : à la fois hommes par le visage et animaux (lions ?) par le corps, avec des ailes géantes. Ces figures-là, à cette époque, sont traditionnelles et les amateurs d’Égyptologie savent que le tombeau de Toutankhamon a révélé, lorsqu’on l’a exploré, une sorte « d’arche » semblable à l’Arche d’Alliance des Hébreux, surmontée par une figure à tête de chacal (Anubis). N’oublions pas non plus qu’Yahvé n’était à l’origine qu’une divinité parmi d’autres et qu’il était entre autres accompagné d’une divinité femelle dédiée à la fécondité. Nous avons affaire ici, et c’est pourquoi la magie en est préservée, aux origines de nos origines : si « l’Arche d’Alliance » continue de faire rêver c’est que son histoire, réelle ou fantasmée, non seulement renvoie au monothéisme de notre temps mais aussi au polythéisme dont il est issu.

En quoi cette histoire nous amène-t-elle à Saint-Vérand ?

Par les deux Chérubins, bien sûr.

L’église du village possède une copie de la Madone Sixtine de Raphaël. Copie signée Zaleski, nous en avons parlé à plusieurs reprises sur ce site. Or Raphaël, dans sa « Madone Sixtine », fait assez précisément allusion à l’Arche de l’Alliance » (nous conseillons à ceux de nos lecteurs qui voudraient plus de détails de consulter le livre de Daniel Arasse « Les visions de Raphaël », merveilleux petit ouvrage, très éclairant. Éditions Liana Lévi, 2003). La Madone selon Raphaël est la nouvelle Arche, chargée de protéger le Seigneur mais, à la différence de l’ancienne, elle ne le cache pas, au contraire : elle le dévoile, l’offre au monde entier. Du coup les Chérubins sont libérés de leur mission.

La copie de Saint-Vérand le montre plus explicitement que l’original de Raphaël : réduits au chômage, nos Chérubins s’ennuient un peu …